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#07 La jungle.

Le nom qu’on leur a donné… Résidences secondaires (suite).

-Ils n’ont pas peur.

-De quoi ?

-D’assumer leur passivité. Annoncer d’entrée de jeu qu’on ne touchera pas au jardin, qu’on n’interviendra pas, qu’on n’essayera même pas. La végétation livrée à elle-même et c’est revendiqué.

-Ça te fait envie ? Je croyais que tu aimais travailler au jardin.

-Ce qui me fait envie, c’est leur culot. C’est comme s’ils avaient écrit : « Je me fous de ce que vous pensez. »

-C’est comme cela que tu le vois ?

-Une villa de ce prix, située là où elle est, tu imagines, et dans l’alignement de toutes les autres, choisir un nom qui dénote, sortir du lot depuis le nom plaqué sur le pilier du portail et laisser le jardin en friche.

-En friche ? Comme tu y vas ! Sur cette bande de front de mer, les jardins, ce n’est même pas de la terre, c’est du sable, rien ne pousse. À part deux malheureux tamaris et une haie qui en prend à son aise et qui cache la maison sur l’arrière.

-Les lettres sont grandes, bien visibles, tous ceux qui passent peuvent le lire. Ici, c’est la jungle. C’est limite menaçant. Comme revendiquer une sauvagerie prédatrice. Vous pénétrez à vos risques et périls.

-Je pense plutôt à Tarzan et Jane se courant après dans la grande demeure de pierres. C’était le fantasme de lui ou d’elle, tu crois ? Ou alors tout simplement, il en a eu marre qu’elle lui dise de s’occuper du jardin et il a fait façonner ces lettres.

-Tu dis n’importe quoi. La maison date de 1900 et l’inscription aussi. Ils devaient avoir un jardinier à l’époque. La Jungle, c’est leur rêve de vivre cachés. Va savoir. On ne saura jamais.

-Tu crois qu’en mairie on trouverait le nom du tout premier propriétaire ?

-Tu en ferais quoi ? Tu as de ces idées parfois… Tiens, regarde le nom de la suivante.

Audio : écouter plutôt que lire…

La jungle – Voix de Julie et de Paul (dialogue entre robots Microsoft)

Mon intention :

Pour continuer mon travail Le nom qu’on leur a donné… Résidences secondaires d’une station balnéaire de la Manche.

Une photo par jour, c’était sur ma page La vie en face ne vous déplaise | Facebook. J’avais volontairement laissé hors champ la villa. Parce que, avais-je écrit, « à regarder seulement la photo du nom de baptême, c’était comme regarder par le trou de la serrure et depuis ne rien voir, inventer, on pouvait ». C’est donc ce que je fais ici : pour chaque nom un bout de leur histoire dévoilé.

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