Si on lisait…
Un avis de lectrice cette semaine avant de reprendre le chemin d’écriture et de vidéoécritures à propos des villas bord de mer, pour l’année à venir poursuivre et nourrir encore le projet « le nom qu’on leur a donné… Résidences secondaires de la Manche ». Elles s’assoupissent une à une, les paillotes ont rangé leurs parasols, la pluie est venue sauver les jardins sablonneux de la sécheresse infligée par le vent d’été, il est temps de se souvenir des lectures passées, de partager.
Elvis à la radio, de Sabine Huynh, éditions Maurice Nadeau :
Une autobiographie pas comme les autres et n’ayant pas bien lu la IV de couverture, ou plutôt après avoir attendu fort longtemps que ma libraire préférée de St Cyr sur Mer le reçoive, je l’ai ouvert en ayant oublié pourquoi il m’avait paru évident de l’acheter, lui, pour le garder, pour y revenir, pour le placer en position d’accompagnateur de vie. Tant d’autres avaient été abandonnés pour cause de réduction de surface habitable. En l’ouvrant je croyais lire l’histoire de l’arrivée en France des parents de l’autrice, qui quittaient le Vietnam, une autobiographie traditionnelle avec un parfum d’inconnu et d’ailleurs, des installations difficiles et périlleuses comme il en existe tant. De suite je me suis rendu compte que je n’y étais pas du tout. Je découvrais au fil des pages une autobiographie écrite à partir de la mémoire défaillante. C’est le pacte que fait Sabine Huynh avec la lectrice, le lecteur. L’autrice a perdu le souvenir de beaucoup de choses et c’est pourtant ce qu’elle veut raconter, écrire. Tout en lisant, je retrouvais le pourquoi de cet achat, un soupçon de similitude entre sa mémoire et la mienne, quelque chose qui ne fonctionne pas. Autobiographie, essai, je ne saurais préciser, parce que ce livre oscille entre les deux constamment. L’autrice refuse de raconter ses souvenirs de façon linéaire, chronologique, elle donne à voir ce qui est resté dans sa mémoire capricieuse, et on voit le bureau cage de verre du père, le chien enchaîné, la mère immobile devant sa machine à coudre… C’est un livre qui parle d’écriture et c’est parfois soulagement et bonheur que d’arriver à ces pages. Le vécu de la jeune fille, ce qu’elle décrit, ce que son corps en garde, atteint le corps lisant. L’écriture pourtant vient sauver quelque chose. Les passages où l’autrice parle d’écriture sont magnifiques. Ils sont très nombreux, je vous en livre ici quelques-uns :
Un livre qui une fois lu est à garder à portée de main. On peut le rouvrir au hasard, à n’importe quelle page.
Averses, de Nathalie Holt :
C’est le deuxième livre de nouvelles que nous offre Nathalie Holt après Ils tombaient.
Comment bien parler de ces nouvelles aux registres si variés depuis celles d’où on ne voudrait jamais sortir de les lire jusqu’à celles qui, partant d’une phrase choc ou énigmatique – forte toujours -, entraînent la lectrice, le lecteur, dans un monde déréglé où tout est source d’inquiétude ? Sinon dans l’émotion et la vibration ressenties. Parfois du Kafka, parfois du Maupassant.
Mais au milieu de cet univers inquiétant il y a aussi une douceur, un regard tendre, comme dans la nouvelle intitulée Ondées. C’est vivre intensément dans cette maison, c’est y être projeté, c’est, contraint et forcé, succomber au processus d’identification, c’est voir sentir respirer toucher, poser le regard sur les murs, l’intérieur des placards, les jeux de lumière, le personnage de la mère, de ses filles, les suivre, se faire ombre à leur suite. Lire ce livre, c’est même procession, se déplacer dans une ambiance envoûtante dont on est imprégné jusqu’à l’identification avec les personnages. Il y a les expressions d’Odette, ses particularités de langage… Mais cette nouvelle ne doit pas occulter toutes les autres plus étranges.
Le lire :
Amazon.fr – Averses – Holt, Nathalie – Livres
Ecouter Averse :
Une des nouvelles de Averses, lecture de Laurent Peyronnet sur sa chaîne YouTube, Quelque chose à vous lire.
(309) Nathalie Holt : « Averse ». Nouvelle extraite du recueil « Averses ». – YouTube
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Encore deux belles femmes, deux belles écritures…
merci de les célébrer et tes chroniques sont très belles aussi
Merci infiniment Anne tellement touchée de tes mots et de ta voix lisant.
Plaisir de retrouver le livre en rentrant pour le relire. Il en vaut la peine. Ou le plaisir. lol
Touchant de t’entendre Anne au fil de ces textes, c’est très beau
Raymonde
Merci, Raymonde. Besoin de ce partage, ma façon de dire à ces autrices que leur travail me nourrit, et de vous les proposer également.
Oui Anne, comme Raymonde je suis touchée en plein coeur par ta lecture de ces livres.
Pouvoir écrire sur l’écriture telle qu’on aimerait qu’elle soit est un acte d’engagement fort.
recevoir cela par la lecture et l’écoute en fait une expérience sensible.
J’aime tes retours si riches et élaborés. Y puiser la force pour « encore ». Je t’embrasse, chère Myriam.